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Episode 4 : journée moyenne pour le marchand de pangolins

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Le vendeur d’animaux exotiques prêts à cuir n’a pas fait de bonnes affaires hier au marché de Wuhan. Il faisait gris et les gens avaient l’air résignés d’on ne pouvait dire quoi. Une drôle d’ambiance, quelque chose qui flottait dans l’air, une intuition étrange.

Les comptes sont vites faits, quelques billets et son compte est à sec. Il faut pourtant nourrir les bêtes vivantes jusqu’au prochain marché, dans deux jours, dans le nord de Wuhan.

Heureusement il a des réserves, sauf pour les deux pangolins restants qui ne se nourrissent que de fourmis. Hélas, comme vous et moi, il n’a pas de fourmi sous la main.

Il y a bien une fourmilière au fond du terrain… il pourrait déposer la cage des pangolins prêt de la fourmilière et y déposer quelques fruits pour attirer les fourmis. Le pangolin ne s’intéresse pas aux fruits, les fourmis, si. Don-Lee se félicite d’un tel génie créatif, qui à défaut de bien nourrir les pangolins, les amusera un moment.

En fouillant sa besace pour y trouver son telephone, il tombe sur une pomme. Oui, celle que lui a donné le producteur de pomme dont il oublie toujours le nom. Toujours une pomme cadeau. C’est gentil.

Il n’aime pas particulièrement les fruits. C’est un carnivore avec une grande ouverture de palais. Il en a mangé des bestiaux, et de toutes natures : des ronds, des plats, des à becs de canards, des qui sentaient, des sans dents, des avec trop de dents, des bonnes surprises et pas mal de mauvaises. Il aime ça, l’exotisme, l’aventure culinaire, tutoyer le pire.

Il coupe la pomme du maraîcher en quatre petits bouts avec un canif publicitaire, puis les place dans la cage de deux pangolins que nous appellerons Sibor et Bora, arbitrairement.

Une fois la cage posée à trente centimètres de l’entrée de la fourmilière, Don-Lee contemple son œuvre. C’est comme une installation artistique, mais avec un objet plus pragmatique.

Mais surtout, ça marche. Les premières fourmis, curieuses et attirées par le sucre des pommes, se pointent pour grappiller des miettes. Sibor est d’abord interloqué par le contexte, puis patiente faute de mieux. Quand il repère quelques fourmis qui s’aventurent dans la cage, il se dit qu’il va enfin pouvoir accéder à une nourriture décente. Mais il patiente, il faut plus de fourmis.
Quant à Bora, elle est tétanisée dans un coin de la cage. Traumatisée par les chocs, le bruit, la foule des hommes, l’incompréhensible voyage en camion.

Quand elle remarque son compagnon d’infortune en train de guetter une masse de fourmis qui s’agglutine sur le fruit, la faim la fait sortir de son état de choc et elle s’avance timidement.

Les deux prisonniers partagent paisiblement leur dernier repas, car chez le pangolin, pacifique et exterminé, le partage est loi.

Leurs langues habiles capturent des petites grappes de fourmis, avec en prime le goût pomme / chauve-souris malade qui donne à ce repas une saveur inédite, mais réconfortante.

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